Le Vénérable Père Marie-Antoine de Lavaur, capucin, appelé Le Saint de Toulouse (1825-1907)
  
 
 
 
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La Foi... parlons-en avec le P. Marie-Antoine

PAROLE D'APÔTRE

La Foi... parlons-en avec le P. Marie-Antoine!1


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  « L’âme qui craint le Seigneur est semblable, disent nos saints Livres, à un arbre magnifique planté le long des eaux limpides. Ses feuilles ne tombent jamais, et il porte toujours des fleurs et du fruit. » La foi vive est la racine, l’espérance ferme, la tige et l’ardente charité, le céleste fruit.
  
   La foi est la vie de la vie chrétienne,
elle y remplit le rôle principal : celui de la racine dans l’arbre. Tant que vous n’avez pas arraché la racine, l’arbre vit et repousse ; si la racine est enlevée, tout est perdu.
Le jour où une âme perd la foi, elle perd tout. Elle signe elle-même son arrêt d’éternelle réprobation.


   Le jour où il n’y aura plus de foi, le monde finira. L’affaiblissement de la foi est le signe caractéristique que Jésus nous donne de l’approche de la fin. La foi est donc la vertu vitale. Par elle seule, nous entrons dans la vie surnaturelle et nous nous unissons à Dieu, source unique de vie et notre fin essentielle.

« Impossible de croire, si les vérités qu’il faut croire ne nous sont pas proposées par ceux qui ont mission divine de les prêcher. Les Apôtres ayant reçu cette mission, comprirent donc la nécessité de composer, avant de se disperser, un abrégé ou symbole de toutes les principales vérités contenues dans la Sainte Écriture, afin qu’il y eût ainsi sur toute la terre une règle de foi uniforme, simple, facile et à la portée de tous : d’où le nom de Symbole des Apôtres. » (Saint Thomas d'Aquin)

Il y a deux vies bien distinctes. La vie naturelle qui, ne dépassant pas nos forces natives, a pour objet ce qui est terrestre et humain, et pour fin, le bonheur de la vie terrestre. La vie surnaturelle qui, dépassant nos forces natives, nous élève au-dessus de nous-mêmes. Elle a pour objet ce qui est céleste et divin, et pour fin le bonheur de la vie éternelle qui, dit l’Apôtre, « consiste dans la claire et éternelle vision de Dieu et de son Christ. » (Rm 5) La première est le domaine spécial de la raison. La seconde, celui de la foi.

Dieu a créé l’homme pour la vie surnaturelle, céleste et divine. Il a donc fait de cette vie sa fin essentielle. Aussi a-t-il voulu, par le seul fait, que la vie naturelle ne fût qu’une préparation à la vie surnaturelle, faisant ainsi de la nature le piédestal de la grâce, et de la raison, le vestibule de la foi.

 

 La foi, dans le sens plus large, est un acte de notre intelligence et de notre raison.  Il consiste à nous faire admettre, sur le témoignage d'autrui, l’existence d'une vérité dont ni l'évidence intime, ni les sens, ne peuvent nous donner la certitude. Si le témoignage est sans valeur, nous ne croyons pas ; s’il est indiscutable, notre raison elle-même nous oblige à croire.

 

  L'homme, qu’il en ait une conscience claire ou non, est plus grand que ce monde. Il lui faut d'autres vérités que celles qui illuminent cette vie faite de petites choses et si fugitive. Dieu seul, mon Créateur, peut me donner alors les réponses que j'attends. Son témoignage seul est acceptable, parce que, seul, il est indiscutable et décisif. Je ne veux pas en accepter d'autre et je ne puis, logiquement, en accepter d'autre. Si ce témoignage existe, si j'ai le bonheur de le recevoir, me voilà heureux. Je me sens tellement disposé à l'accepter et à croire, que je suis prêt à donner mille fois ma vie pour soutenir et affirmer cette foi. Comment douter, en effet, de la véracité d'un Dieu ?

 

Ce ne sont plus, alors, des vérités de l'ordre naturel qu'il s'agit de croire, mais des vérités d'un ordre infiniment plus élevé. La science humaine, cependant si infatigable navigatrice, n'aurait jamais pu, toute seule, atteindre  ces rivages. Il faut que la science divine vienne au secours de sa sœur car elles sont filles du même père, « le Dieu des sciences », et la rende abordable. Elle fait pour elle l'office de marins habiles qui vont en pleine mer chercher les vaisseaux pour les conduire au port, où leur pilote seul n'aurait jamais su pénétrer. La foi rend ainsi à la raison le service d'une sœur aussi divinement dévouée qu’elle est divinement intelligente.

C’est vrai, la foi, pour y conduire la raison, lui a demandé de lui céder le gouvernail. Elle a dû elle-même le prendre en main, et la raison, jusqu'ici pilote, a dû devenir simple passagère. Mais ce sacrifice qu'elle ne fait à aucun homme et qu’elle ne doit faire à aucun homme, elle a compris qu’elle devait le faire à Dieu. La raison n'est donnée à l'homme que pour arriver à la foi.

Par la foi, l'homme, c'est vrai, se soumet à Dieu et lui rend la seule gloire qui soit digne d'un Dieu, puisqu'en soumettant sa raison, il fait pour Lui ce qu'il ne doit faire pour personne. Mais voici la récompense : par cette soumission il entre immédiatement en union avec Dieu et son intelligence est déifiée.

  

   La foi élève l'homme au-dessus de lui-même. Elle ajoute à sa nature première un accroissement sublime.  Elle lui donne comme un sens nouveau que l'Apôtre appelle admirablement le sens du Christ (1 Co 2).

 

 Ce que fait l'aigle pour ses petits quand il les prend sur ses ailes pour leur faire contempler le soleil, la foi le fait pour notre âme. Elle nous prend sur ses ailes de lumière et d'amour, elle nous fait monter au-dessus du visible, et nous plonge dans l’invisible et  le divin. « C'est une vision béatifique commencée, » s'écrie le Docteur Angélique. « C'est déjà la substance du bonheur futur » avait dit saint Paul. Et le goût ineffable que l'âme trouve dans cette substance, est l'argument par excellence de la réalité de ces invisibles vérités (He 2). Quel meilleur argument pour la lumière que la lumière elle-même ? Or, la foi en inonde notre âme, et alors quelle jouissance !

 

 Oui, il en est ainsi, et l'expérience le prouve, nous sommes faits pour la foi. Si nous laissons la religion, qui est la vie, nous allons à la superstition, qui est la mort.

L’éternelle vérité et l’éternelle charité, voilà le ciel ; la foi en donne l’avant-goût sur la terre. En mettant l’union dans les esprits, elle la met dans les cœurs. L’erreur, au contraire, fille de la raison abandonnée à elle-même, divise à la fois les esprits et les cœurs, et nous donne déjà sur la terre le spectacle de l’enfer.

« Je ne compte que sur la foi, dit l’immortel Fénelon, pour diriger la raison dans les bornes étroites de la raison. » Quand la raison est au bout d'elle-même, et elle y est bientôt, il faut que la foi  vienne lui donner la main, ou la voilà à terre !

  

 « Ce besoin de foi que je sentais pour la société, je le sentais pour moi-même. Ô joie ! ô consolation ! La lumière de la foi a lui et c'est par la raison que j’ai retrouvé, plus resplendissant de vérité que jamais, ce même catholicisme qui me fut jadis enseigné par la bouche de ma mère. Et ce que j'admire chaque jour avec un nouveau ravissement, c'est la merveilleuse harmonie qui existe entre la nature et la grâce, entre la raison et la foi. Ma prière suprême à tous les membres de ma famille et à tous les enfants qui pourront naître d'eux, c'est de persévérer dans la foi malgré les humiliations, les scandales, les désertions dont ils seront témoins dans nos temps malheureux. » (Fr. Ozanam  - Recueil de ses lettres)

L’homme est tout ensemble raison et cœur. L’acte de foi, étant l’acte humain par excellence, est donc un acte de raison et de cœur. On croit par la raison et on croit par le cœur. Il faut en conclure que ce qui fait perdre la raison et le cœur fait perdre la foi. Or, l’orgueil fait perdre la raison, et l’avarice et la sensualité font perdre le cœur, l’expérience le prouve. Les orgueilleux, les avares et les jouisseurs perdent donc presque infailliblement la foi. Ils la perdent surtout parce que, faisant leur dieu de la gloire, de l’argent et de la chair, ils ne prient plus le Dieu qui mérite seul nos prières et notre amour, et qui a voulu faire de la prière la condition essentielle de tous les dons qu’il nous accorde pour les faire apprécier et aussi un peu mériter.

Tous les hommes, s’ils priaient, obtiendraient la foi et tous la conserveraient. Une prière faite avec humilité et confiance vaut mieux que tous les raisonnements de la terre.

On revient à la foi quand on quitte ses passions. Dieu cherche toujours le cœur qui l’a exilé. Quand les fumées de l’orgueil sont tombées, Dieu rentre dans l’âme qui s'était éloignée.

C'est toujours dans le cœur que la foi meurt et qu’elle ressuscite. C'est toujours du cœur que les nuages montent.  Il n'y a pas de nuages quand le ciel est pur. Bienheureux le cœur pur ! Il plonge toujours, Seigneur, dans vos clartés immortelles !

Si la foi est précieuse pour vivre, elle est surtout précieuse pour mourir. Heureux les pauvres naufragés de la foi qui abordent au rivage !

Rien de plus raisonnable et de plus logique que la foi. Elle est la base de toute la vie humaine et chrétienne. Sans la foi aux hommes, la société est impossible ; sans la foi à Dieu, le salut est impossible. Le juste vit de la foi, elle est la substance divine de l’âme, et toutes les vertus trouvent là leur racine.

La foi a recours à la raison pour montrer l'admirable harmonie tant dans les mystères entre eux que dans leurs rapports avec le monde naturel.  Se plaindre après cela, c'est pour la raison la plus grande des ingratitudes. « Je ne crois que ce que je comprends » est une folie. Que diriez-vous de celui qui refuserait de la nourriture parce qu'il ne comprend pas comment elle se change en éléments nutritifs ?

L'homme qui n'a pas la foi peut-il être sauvé? Le devoir d'obéir à la loi n’existe que dans la mesure de sa connaissance.  Dieu étant infiniment juste, ne peut pas exiger davantage. Et tous les hommes n'auront à rendre compte à son tribunal que des lumières et des grâces qu'ils auront reçues.

    « Fortifiez le fondement de la foi, dit saint Augustin, et puis bâtissez dessus l'édifice de la science. » Le doute, quand on est dans l'erreur, est un commencement de lumière. Quand on est dans la vérité, il est déjà les ténèbres.

   

La prière, c’est la soumission du cœur. La foi, c’est surtout celle de l’esprit. Le cœur est toujours le premier que Dieu demande. « Il est amour »  et c’est par lui que l’homme lui ressemble. C’est le cœur qui vivifie toute notre vie matérielle. C’est par lui qu’elle commence et c’est par lui qu’elle finit. C’est le premier organe qui se forme en nous et c’est le dernier qui palpite. C’est par le cœur humble et pur que la foi arrive et se conserve, c’est par le cœur orgueilleux et impur que la foi se perd : donc encore une fois, la prière ! la prière !

Cette rencontre de Dieu et de l’âme sur l’échelle d’or de la foi, ce doux baiser d’amour, voilà la vie divine : c’est surtout par la prière, expression par excellence de la foi, que s’opère ce merveilleux embrassement. Dieu le veut, parce qu’il veut faire l’honneur à l’homme de coopérer librement à son œuvre divine.

Quand mon cœur dit Credo, il le dit sur le cœur du Christ avec le cœur de Jean, le disciple de l’amour, avec le cœur de Madeleine, la conquête de l’amour. Avec le cœur de tous les martyrs, sublimes victimes de l’amour ; avec le cœur de François d’Assise, stigmatisé de l’amour ; avec le cœur d’Antoine de Padoue, le lis de l’amour ; avec le cœur de Thérèse, la lyre vivante de l’amour ; avec le cœur de François-Xavier, l’apôtre de l’amour ; avec le cœur de Vincent de Paul, le merveilleux économe de l’amour.

Obéissant à la loi de l'amour, emporté par cet amour, le Verbe part du sein de la Trinité, et il vient frapper à la porte de chaque cœur. Il nous le dit  lui-même : « Je suis à la porte de ton cœur et je frappe » (Ap 3). C’est une illumination, c’est une impulsion mystérieuse à laquelle « aucune âme ne peut se soustraire. » (Ps 18) Et que dit-il en frappant ? « Ouvre-moi, âme bien-aimée, je veux être ton frère et ton époux » (Ct 5). « Je suis ton chemin, ta vérité et ta vie » (Jn 14). Crois à ma parole : par cet acte de foi, ouvre-moi la porte et j’entrerai, et l’union sera accomplie, « et notre union sera éternelle. » C’est dans ces splendeurs de la foi que s’accomplit l’union du Verbe avec l’humanité dans le sein de Marie. Le corps mystique du Christ se forme et s’édifie dans ces mêmes splendeurs. La foi est le ciment d’union.


1. Cette page est tirée du livre du P. Marie-Antoine L'homme est fait pour la Foi réédité aux Éditions du Pech. Pour en savoir plus (suite)

 


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